L’ISO, l’Organisation Internationale de normalisation offre aux acteurs de la société de nombreuses outils pour encourager l’amélioration continue des systèmes de management. Même si des nombreuses normes de systèmes de management pour la santé et la sécurité (ILO OSH 2001, OHSAS 18001, …) sont largement déployées, à ce jour, aucune n’est reconnue par l’ISO pour la certification des systèmes de management santé sécurité au travail. L’ISO 45001 permettra t’elle de relever ce défi ?

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Parmi les référentiels les plus utilisés, rappelons nous la création dès 1987 de la série ISO 9000 avec en particulier l’ISO 9001 qui propose les exigences à prendre en compte pour la certification des systèmes de management de la qualité. Dès 1987, les acteurs de la société affirmaient haut et fort la nécessité de se préoccuper des besoins et attentes de ses clients.

En 1994, apparaissait la série ISO 14000 avec notamment l’ISO 14001 pour la certification du système de management environnemental. Un organisme responsable a le devoir de prendre en compte les impacts environnementaux générés par ses activités. Il doit les maîtriser en vue de protéger l’environnement et améliorer en continue sa performance environnementale.

Ces deux normes ont été révisées à plusieurs reprises, s’appliquant par la même le principe d’amélioration continue dont elles assurent une large promotion.

Depuis, d’autres référentiels ont été créés relatifs au management, aux systèmes de management , à la performance des organismes ou à la responsabilité sociale des organisations. Il n’existe pas à ce jour de norme ISO pour le système de management Santé et Sécurité au Travail. Dans le passé, une première tentative avait avorté suite au vote négatif de nombreux pays dont la France.

Ainsi depuis 2010, l’ISO 26000 posaient un cadre pour conduire une gouvernance, un management et des pratiques plus responsables vis à vis des enjeux sociétaux. Il s’agit d’amener les organisations à conduire un développement plus responsable vis à vis de la société et de l’environnement sur des questions jugées centrales pour la Société. Parmi celles ci, les relations et les conditions de travail comprenant notamment la question de la santé et de la sécurité au travail.

En effet, comment prétendre adopter une politique responsable en focalisant son attention sur ses  seuls clients, sur la protection de l’environnement et ne pas se préoccuper des personnes au travail, bien souvent de collaborateurs, de collègues, de partenaires parfois si proches de nous.

Et pourtant, la chronologie des sorties de normes internationales de systèmes de management pourrait laisser à penser qu’il ne s’agit pas d’une évidence :

1987 : ISO 9001, importance accordée au client

1996: ISO 14001, devoir de maîtriser ses impacts environnementaux

2010 : parution de l’ISO 26000 qui pose les principes et les lignes directrices pour la responsabilité des organisations.

Enfin en 2015, même s’il convient de rester prudent suite à un premier vote négatif, nous pourrions espérer que l’Humain retrouvera enfin sa place et que l’on affirmera haut et fort qu’il n’est pas acceptable d’accepter à priori la possibilité de se blesser ou d’être malade du fait de son travail.

En effet, cette année les travaux de normalisation ont débuté et des premiers documents de travail de l’ISO 45001 sont publiés. La parution définitive est attendue pour 2016 voire 2017 compte tenu des débats entre les acteurs et d’un premier vote qui n’a pas abouti sur les premières versions.

Pourquoi une telle norme ?

La santé sécurité au travail, un enjeu sociétal.

Chaque année dans le monde, selon l’OIT 2,2 millions de personnes meurent suite à une maladie ou à un accident du au travail.

En France, selon l’INRS, « chaque année, les accidents du travail et les maladies professionnelles se traduisent par la perte de 45 millions de journées de travail. Les conséquences humaines, financières et juridiques de ces dysfonctionnements sont majeures pour les entreprises et leur personnel » et la Société toute entière.

Quel serait son objet ?

L’ISO 45001 précise les exigences applicables aux systèmes de management de la santé et la sécurité des personnes qu’elles emploient. Elle s’inscrira comme une norme utilisée pour la certification des systèmes de management correspondants.

Quel pourrait être son contenu ?

Comme l’ISO 14001, l’ISO 9001, l’ISO 45001 adoptera la « High Structure Level » ou « Structure de Haut Niveau ».

Au delà des trois premiers chapitres introductifs, l’ISO 45001 pose un cadre totalement compatible avec les principales normes de système de management avec comme grands chapitres :

4 Contexte de l’organisme : il s’agit de situer l’organisme dans son éco système, déterminer quels sont ses enjeux externes et internes, quelles sont les parties intéressées, quelles sont leurs besoins et attentes.  Définir ensuite les limites du système , poser le cadre pour le système de management.

5 Leadership : Poser l’engagement de la direction, déterminer la politique correspondante, définir les rôles et responsabilités, assurer la compatibilité de la politique et des objectifs avec l’orientation stratégique. Appuyer enfin l’action managériale tout au long de la ligne hiérarchique.

6. Planification : Déterminer la planification préventive en prenant en compte les risques et les opportunités vis-à-vis de l’atteinte des résultats escomptés, des effets indésirables et de l’amélioration continue, planifier les objectifs et les actions pour les atteindre

7 Supports : organiser  et manager les ressources, les compétences pour atteindre les objectifs fixés. Organiser les sensibilisations et la communication nécessaires, gérer l’information correspondante.

8 : Réalisation des activités opérationnelles : planifier et réaliser le travail en prenant en compte les exigences santé et sécurité utiles à la prévention et l’amélioration des performances Santé Sécurité au Travail.

9 : Evaluation des performances : il s’agit de se doter des outils nécessaires pour surveiller et maîtriser les activités, piloter la performance et donner le cadre pour l’amélioration continue notamment au travers des outils et de la revue de direction.

10 Amélioration continue : il s’agit de traiter les situations anormales, les accidents, incidents,les actions correctives et l’amélioration continue.

Quels sont les principales nouveautés possibles portées par cette révision ?

Les différents référentiels de systèmes de management sont totalement compatibles.

Comme pour ses consoeurs, les normes ISO 9001 et ISO 14001, l’importance de la prise en compte plus large des éléments du contexte de l’organisme est affirmée.

Une approche globale encore plus systémique :

Il ne s’agit pas d’aborder la démarche par le petit bout de la lorgnette, sous un angle seulement opérationnel mais d’adopter une approche plus globale du fonctionnement dans un éco-système. Celui ci est porteur d’enjeux pour l’organisme tout comme plusieurs parties prenantes peuvent être concernées (intéressées par les questions de santé et de sécurité au travail). Ce peut être le cas des donneurs d’ordres, des sous traitants, des services de l’Etat, des représentants du personnel ou d’autres encore. L’efficacité des actions dépend aussi de la contribution des différentes interactions entre les parties intéressées.

Une implication de la direction renforcée :

Si la responsabilité ultime de l’employeur est affirmée dans notre code du travail, un système de management santé et sécurité est dépendant du niveau de son engagement, de sa capacité à soutenir ses équipes, à impliquer ses collaborateurs, à déployer cet engagement tout au long de sa ligne hiérarchique et de sa chaîne de valeur. Que dire de la responsabilité sociétale d’un organisme qui veillerait rigoureusement à la protection de ses salariés en externalisant sauvagement les activités à risque sans se préoccuper d’aucune manière des conditions d’exposition des salariés de ses sous traitants.

Quels sont les pays qui participent aux travaux ?

54 pays participent sont impliqués dans les groupes de travail et 16 pays sont inscrits en tant qu’observateurs. Les USA, la Chine, l’Inde, l’Allemagne,la Grande Bretagne la Russie sont intégrés dans les groupes de travail. Le Brésil est inscrit comme observateur (voir la liste ici).

Les textes seront ils votés ? Le calendrier sera t’il respecté ?  “Wait and see”. Il est sans doute un peu tôt pour conclure. En tant qu’acteur responsable, soucions nous de la santé et de la sécurité des personnes au travail. Les normes ISO ou autres peuvent nous aider, tout comme la réglementation qui parfois peut aussi nous contraindre. Dans tous les cas, n’oublions pas le bon sens. Comment parler de responsabilité sociale sans se préoccuper de la santé et de la sécurité de ceux qui travaillent pour nous, chaque jour à nos cotés.