Depuis le début des années 2000, l’exigence en matière de reporting extra-financier est renforcée. Depuis 2017, les entreprises répondant aux seuils définis doivent désormais produire une « déclaration de performance extra-financière ».

Le reporting se définit comme le moyen de remonter et d’exploiter les informations relatives à la gestion de l’entreprise. Cette remontée d’informations et l’exploitation est une exigence naturelle pour l’entreprise elle-même. C’est aussi une obligation réglementaire pour la société qui doit publier ses comptes et parfois les faire certifier afin de rassurer les parties prenantes sur la fiabilité des informations et des comptes publiés.

Nous proposons au travers de cet article de :

  • Rappeler l’origine, l’évolution et les enjeux de ce reporting ;
  • Présenter l’évolution des exigences correspondantes ;
  • Préciser quelles entreprises sont aujourd’hui concernées ;
  • D’identifier les exigences correspondantes pour celles-ci ;
  • De formuler des recommandations de mise en oeuvre.

Le reporting extra-financier ? Les origines, les enjeux

Le monde comprenait 1,860 milliard d’habitants en 1920. Le 8 aout 2018, la Terre est peuplée par 7,6 milliards d’habitants soit une croissance de plus de 308 % en moins d’un siècle. Dans le même temps la société connait plusieurs révolutions (industrielles technologiques, sociales et sociétales) de plus en plus fortes, de plus en plus rapides.

Les conséquences de ces évolutions sont nombreuses notamment :

  • Un partage des ressources naturelles limitées pour une population toujours plus nombreuse aux besoins illimités ;
  • Des crises énergétiques plus fortes, plus fréquentes ;
  • Le dérèglement climatique, l’augmentation des catastrophes naturelles ;
  • Des mutations technologiques, industrielles plus rapides, plus violentes ;
  • Une augmentation de l’espérance de vie, l’évolution des conditions de prise en charge des personnes dépendantes ;
  • Une révolution en matière de collecte et d’exploitation des données ; …

La Société n’accepte plus aujourd’hui de supporter le coût de ces évolutions et des crises ou catastrophes correspondantes.
Il ne s’agit pas d’un comportement plus vertueux mais d’une approche pragmatique de management du risque. A titre d’exemple, le secteur de l’assurance a publié son propre guide du reporting RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) relatif à la transposition de la directive européenne sur le reporting non financier. « L’assurance a un rôle fondamentalement sociétal de par la nature même de ses activités. Elle joue un rôle de protection des ménages et des entreprises qu’elle accompagne à tous les moments de leur vie. Santé, retraite, dépendance, développement de l’activité professionnelle, protection contre les catastrophes naturelles, prévention des accidents et des pathologies : l’offre de la profession participe au bien-être social ».

L’évolution des exigences légales et réglementaires

Le suivi des seuls indicateurs économiques et financiers ne suffit plus. Que penser d’une entreprise qui connaitrait une croissance régulière de son chiffre d’affaires alors que dans le même temps elle ne respecterait pas les exigences légales et réglementaires en matière de protection de l’environnement ou en matière de protection de ses employés ?
L’actionnaire, les fournisseurs ou les autres parties prenantes ne partageraient-elles pas le préjudice pénal, économique, financier en cas d’accident grave (accident mortel du travail, catastrophes industrielles , etc.) ?

Le législateur a donc décidé de renforcer son cadre législatif et réglementaire avec l’instauration dès 2001 de la loi NRE (Nouvelles Régulations Economiques), dont l’article 116 imposait aux sociétés cotées la publication, au sein de leur rapport de gestion annuel d’informations sur les conséquences sociales et environnementales de leurs activités (article L 225-102-1 du Code du Commerce).

En juillet 2010, l’article 225 de la loi Grenelle 2 et le décret publié le 26 avril 2012 complète les exigences par l’instauration de :

  • La mise en place de modalités de contrôle des informations publiées par un Organisme Tiers Indépendant (OTI) accrédité ;
  • L’accroissement du nombre d’entreprises concernées ;
  • L’élargissement de l’éventail des sujets à traiter.

Le 22 juillet 2015, l’Assemblée Nationale adoptait la loi sur la transition énergétique. Celle-ci stipule que les entreprises soumises aux obligations de reporting extra financier doivent désormais intégrer dans leur rapport « les conséquences sur le changement climatique de leurs activités et de l’usage des biens et services qu’elles produisent ».

Deux années plus tard, la France transposait la directive 2014/95/UE imposant désormais non plus seulement un rapport d’indicateurs extra-financiers mais une « déclaration de performance extra-financière”.

Quelles entreprises sont concernées aujourd’hui ?

  • Les sociétés cotées employant plus de 500 salariés avec un total du bilan supérieur à 20 millions d’euros ou un chiffre d’affaires dont le montant net est supérieur à 40 millions d’euros ;
  • Les sociétés non cotées employant plus de 500 salariés avec un total du bilan supérieur ou un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros ;
  • Sont concernées par ces seuils les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les SaRL, les SAS ;
  • A noter que les filiales dépassant les seuils ci-dessus peuvent être exemptées dès lors que la société mère, située en France ou dans un Etat membre de l’Union Européenne publie une telle déclaration sur le périmètre consolidé.

Comment établir la déclaration de performance extra-financière ?

Le contenu

  • Tout d’abord, la déclaration de performance extra financière est un élément du rapport de gestion de l’entreprise ;
  • La déclaration doit fournir des informations sur les conséquences sur le changement climatique des activités, des produits et services fournis ;
  • Les engagements sociétaux en faveur du développement durable, de l’économie circulaire et de lutte contre le gaspillage alimentaire ;
  • Les accords collectifs conclus dans l’entreprise : leurs impacts sur la performance économique de l’entreprise et sur les conditions de travail des salariés ;
  • Les actions de lutte contre les discriminations et de promotion de la diversité ;
  • Les sociétés cotées doivent aussi produire des informations relatives aux droits Humains et à la lutte contre la corruption. Les grandes entreprises soumises aux dispositions relatives au devoir de vigilance peuvent renvoyer au rapport de vigilance.

Comment procéder ?

Ne pas oublier que la déclaration de performance environnementale est une partie du rapport de gestion et à ce titre, elle ne devrait pas être déconnectée du rapport établi pour la communication financière.

Il s’agit de décrire le contexte dans lequel agit l’entreprise c’est-à-dire les enjeux économiques, sociaux et environnementaux pour l’entreprise et ses parties prenantes.

Au regard de ce contexte, il convient de se poser les questions suivantes :

  • Quels sont les politiques, les stratégies, les engagements pris, les objectifs poursuivis ?
  • Quels sont les risques sociaux et environnementaux consécutifs aux activités réalisées, des produits et services fournis identifiés et évalués comme significatifs ?
  • Quels sont les moyens correspondants mobilisés par la gouvernance, le management, l’organisation ou « les politiques appliquées, en appliquant le cas échéant, les procédures de diligences raisonnable mises en oeuvre pour prévenir, identifier et atténuer la survenance de ces risques et donner les résultats de ces politiques incluant les indicateurs clés de performance » ?
  • Quels sont les indicateurs clés utilisés pour le pilotage ?
  • Quels sont les résultats ?

Par ailleurs, les entreprises ont le choix des informations et des indicateurs qu’elles considèrent comme pertinents.

Enfin, l’information, selon l’article R.225-105 doit respecter le principe de matérialité :

  • Les entreprises doivent adapter l’information à la réalité de leur activité, en appuyant sur leur contexte, leur modèle commercial ou modèle d’affaire (business model) ;
  • Mettre en oeuvre le principe dit « comply or explain » (« appliquer ou expliquer ») en précisant que lorsque la société n’applique pas de politique en ce qui concerne un ou plusieurs de ces risques, la déclaration doit comprendre une justification claire et motivée.

Quel niveau de granularité prendre en compte pour la déclaration de performance extra financière ?

La Commission Européenne fournit des recommandations pour cette description : Communication de la commission Européenne 2017/C 215/01 : lignes directrices sur l’information non financière – méthodologie pour la communication d’informations non financières. Elle énonce 6 principes que les sociétés doivent adopter en matière de reporting d’informations :

  • Publier des informations significatives ;
  • Fournir une information fidèle, équilibrée et compréhensible ;
  • Fournir une information complète, mais concise ;
  • Fournir une vision stratégique et prospective ;
  • Fournir une information tournée vers les parties prenantes ;
  • Une information logique et cohérente.

Le décret du 7 février 2017 précise que la déclaration sur la performance non financière présente le modèle commercial de la société. Là aussi, la Commission Européenne fournit des recommandations. « Lorsque les sociétés décrivent leur modèle commercial, elles peuvent envisager d’inclure des informations appropriées concernant :

  • Leur environnement commercial ;
  • Leur organisation et leur structure ;
  • Les marchés sur lesquels elles opèrent ;
  • Leurs objectifs et stratégies ;
  • Les tendances et facteurs principaux qui pourraient avoir une influence sur leur évolution à l’avenir ».

Quelques exemples d’indicateurs clés qui restent à adapter en fonction du contexte de l’entreprise

Social

  • Emploi : voir les indicateurs du bilan social ;
  • Organisation du travail : organisation du temps de travail, absentéisme de courte durée, global,etc.
  • Santé sécurité au travail : Nombre d’accidents avec arrêt, sans arrêt, taux de fréquence, taux de gravité, nombre d’actions de prévention, … ;
  • Relations sociales : organisation du dialogue social au sein de l’entreprise, procédures d’informations, consultation, accords signés, bilan des accords collectifs, bilan santé sécurité ;
  • Formation : politiques formation, notamment en matière de protection de l’environnement, du respect des droits de l’homme, de la santé sécurité au travail, de la promotion de la diversité, …

Environnement :

  • Politique environnementale, organisations, moyens consacrées, montant des provisions et garanties pour les risques correspondants ;
  • Pollution : actions entreprises pour la prévention, la réduction ou la réparation de rejets dans l’eau, l’air, les sols pouvant affecter l’environnement, … ;
  • Economie circulaire : prévention et gestion des déchets, utilisation durable des ressources ;
  • Changement climatique : postes significatifs d’émissions de gaz à effet de serre, adaptation aux conséquences changement climatique, … ;
  • Protection de la biodiversité : mesures de prévention ou prises pour promouvoir, développer la biodiversité.

Sociétal

  • Egalité et traitement : mesures prises en faveur de l’égalité hommes-femmes, accueil des travailleurs en situation de handicap, des seniors, ou de populations vulnérables, actions de prévention des discriminations ;
  • Ancrage territorial : développement de l’emploi local, impact de l’activité sur les riverains, dialogue avec les acteurs locaux, actions de partenariat, de sponsoring, de mécénat ;
  • Lutte contre la corruption : actions de prévention engagées
  • Droits de l’Homme : promotion et respect des stipulations des conventions fondamentales de l’Organisation Internationale du Travail.

Plusieurs organismes proposent des méthodes ou des outils pour réaliser les rapports, déterminer les indicateurs pertinents.
Parmi les référentiels les plus utilisés :

  • l’ISO 26000 ;
  • Le Global Compact ;
  • Les Principes directeurs des droits de l’Hommes et des entreprises ;
  • Les lignes directrices de l’OCDE pour les entreprises multinationales ;
  • Le « GRI ou Global Reporting Initiative ».

Le GRI propose une méthodologie pour l’élaboration de rapports en matière d’environnement, de responsabilité sociétale et de gouvernance. Le GRI propose un cadre utile pour le reporting extra-financier et la déclaration de performance extra-financière.

Quelles sont les exigences en matière de vérification et de publicité de la déclaratoin de performance extra financière ?

Les rapports ouverts à compter du 1er aout 2017 sont concernés par la déclaration de performance extra financière ;
La vérification des informations par un organisme tiers indépendant accrédité (COFRAC en France) sera réservé aux sociétés dépassant les seuils qui seront fixés par un décret en Conseil d’Etat ;
La déclaration doit être insérée dans le rapport de gestion et être librement accessible aux parties prenantes sur le site internet de la société.

Quels sont les risques pour la société qui ne déclare pas ?

En cas de non déclaration, selon l’article L. 225-102-1 du code de commerce, toute personne intéressée peut demander au président du tribunal statuant en référé d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, au conseil d’administration ou au directoire, selon le cas, de communiquer les informations qui doivent y figurer. Lorsqu’il est fait droit à la demande, l’astreinte et les frais de procédure sont à la charge, individuellement ou solidairement selon le cas, des administrateurs ou des membres du directoire.

Comment le cabinet ANTHEA CONSEILS peut-il vous aider ?

Les consultants ANTHEA CONSEILS peuvent vous accompagner pour la l’élaboration et la mise en oeuvre de ce reporting.
ANTHEA CONSEILS propose une offre complète en matière de responsabilité sociétale,
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Webographie

https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/diplomatie-economique-et-commerce-exterieur/peser-sur-le-cadre-de-regulation-europeen-et-international-dans-le-sens-de-nos/l-engagement-de-la-france-pour-la-responsabilite-sociale-des-entreprises/la-politique-nationale-de-rse-en-france/article/la-legislation-francaise-en-matiere-de-reporting-extra-financier#

http://www.medef.com/fileadmin/user_upload/www.medef-corporate.fr/document/RSE/MEDEF_-_Guide_Reporting_RSE_-_Mai_2012.pdf

https://www.ffa-assurance.fr/content/reporting-rse-les-bonnes-pratiques-du-secteur-de-assurance

https://doc.cncc.fr/docs/declaration-de-performance-extra/attachments/communique-rse-juin-2018

https://www.globalreporting.org/resourcelibrary/French-How-To-Use-the-GRI-Guidelines-In-Conjunction-With-ISO26000.pdf

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=uriserv:OJ.C_.2017.215.01.0001.01.FRA&toc=OJ:C:2017:215:TOC

https://www.novethic.fr/isr-et-rse/comprendre-la-rse/quest-ce-que-la-rse.html