Les organismes encore certifiés ISO 9001 version 2008 ont jusqu’au mois de septembre 2018 pour faire certifier leur système de management selon les exigences de la révision 2015.

La version 2015 apporte de nombreux changements significatifs dont nous nous sommes fait l’écho dans d’autres articles :

Outre ces changements de fond, les évolutions relatives au système documentaire apparaissent également. On ne parle plus de procédures, de documents, d’enregistrements mais d’informations documentées. Le sacro sain manuel qualité n’est plus cité dans le texte de la norme.

Nous proposons ici de :

  • Rappeler les différents documents ou enregistrements demandés pour les  systèmes de management de la qualité des versions antérieures (ISO 9001: 2008)
  • Définir la notion d’informations documentées
  • Lister les exigences correspondantes,
  • Proposer des recommandations sur le devenir et l’évolution du système documentaire existant.

Les différents documents et enregistrements depuis l’origine de l’ISO 9001  : Manuel qualité, procédures, enregistrements

Le manuel qualité

Ce document apparait dès la première version de la norme  ISO 9001 en 1987 et restera une exigence explicite jusqu’en 2008.
Il est initialement établi pour permettre à des clients et des fournisseurs qui n’exercent pas le même métier de se comprendre. Il présente ou fait référence aux procédures applicables.

Plus largement il s’agit alors pour un organisme de présenter à ses clients son organisation et plus particulièrement son système de management de la qualité en vue de leur donner confiance dans la capacité à offrir une organisation apte à réaliser les produits et services conformes aux exigences attendues.
A l’usage, on lui trouvera d’autres intérêts, par exemple servir de support de management pour le personnel.
Parfois, malheureusement, il ne sera destiné qu’à un seul lecteur, l’auditeur.

En 2015, aucune référence au manuel qualité n’est spécifiée dans la norme ISO 9001. Il appartient donc à l’entreprise de décider si celui ci peut lui être  utile ou non. A titre d’exemple, ce peut être un excellent support de présentation à joindre lors d’une réponse à un appel d’offres. Il peut également servir de support de management sous la même forme ou sous une forme adaptée en conséquence. Comme tout document, avant de rédiger le manuel, il convient de répondre à la question : Pour quoi faire ? Pour quelle cible ?

Les procédures

En 1987, la seule culture orale était encore très présente dans de nombreuses organisations. L’un des objectifs de la norme ISO 9001 était alors de permettre la formalisation des méthodes de travail dans le but de pouvoir mieux les maîtriser, les partager, les améliorer. La norme comptait 20 chapitres et quasiment autant d’exigences de procédures écrites. A l’époque, être certifié ISO 9001 consistait bien souvent à «écrire ce que l’on faisait, faire ce que l’on avait écrit et le prouver ».
En 2000 l’approche processus remplace l’approche procédure. 6 thèmes doivent faire alors l’objet de procédures écrites :

  • la maîtrise des enregistrements
  • La maitrise des documents
  • Les non conformités
  • Les actions correctives
  • Les actions préventives
  • Les audits

Pour le reste il appartenait à l’entreprise de décider quelques étaient les procédures utiles pour maîtriser et améliorer leurs processus. On ne parlait  pas explicitement de management des risques même si celui-ci était déjà implicite.

Les enregistrements

Les enregistrements constituent les preuves de réalisation des activités. Il peut s’agir de résultats de contrôles, de rapports d’audits, de réclamations. Ce sont généralement des informations que l’organisme se doit de conserver pendant une durée définie car il peut être amené à les présenter à un client ou à une autre partie intéressée.

 

ISO 9001 : 2015 : Les informations documentées : de quoi parle t’on ? Quelles sont les exigences correspondantes ?

De quoi parle t’on ?

Les termes “informations documentées” remplacent l’ensemble des termes : manuel qualité, procédures, enregistrements. L’annexe A6 de l’ISO 9001 “Informations documentées” précisent : « Là où l’ISO 9001:2008 utilisait une terminologie spécifique, telle que «document» ou «procédures documentées», «manuel qualité» ou «plan qualité», la présente édition de cette Norme internationale exige de «tenir à jour des informations documentées».

Cela signifie que comme par le passé, les informations documentées doivent être maitrisées. Il s’agit notamment d’être en mesure d’utiliser des informations ou des documents à jour et lorsque ceux ci doivent être conservée (enregistrées) quelles sont les modalités de conservation (durée, lieu, …)

Selon l’ISO 9001, quelles sont les exigences requises en matière d’informations documentées ?

Le Domaine d’application

« Le domaine d’application du système de management de la qualité de l’organisme doit être disponible et tenu à jour sous la forme d’une information documentée »(article 4.3). En effet, les choses doivent être clairs. Le client et les parties intéressées doivent savoir ce qui rentre dans le périmètre du système de management et ce qui n’y rentre pas.

La politique qualité

La politique doit être également documentée afin de pouvoir être communiquée. (article 5.2.2). La communication même si elle n’est pas suffisante est un premier acte d’engagement. Sans communication, le partage est difficile.

Les informations nécessaires à l’efficacité du système :

L’article 7.5 « informations documentées stipule : « Le système de management de la qualité de l’organisme doit inclure :
a) les informations documentées exigées par la présente Norme internationale;
b) les informations documentées que l’organisme juge nécessaires à l’efficacité du système de management de la qualité“.

La note liée à cette exigence apporte plusieurs précisions quand à la définition de ces informations documentées « L’étendue des informations documentées dans le cadre d’un système de management de la qualité peut différer selon l’organisme en fonction de:
— la taille de l’organisme, de ses domaines d’activité et de ses processus, produits et services;
— la complexité des processus et de leurs interactions;
— la compétence des personnes ».

On comprend ici que les informations documentées sont, outre celles imposées explicitement par la norme, les informations jugées utiles par l’entreprise pour lui permettre d’atteindre ces objectifs qualité en terme de maîtrise de ces processus, de leur capacité à sortir des produits et services conformes, à améliorer ses processus, ses produits, ses services.

Les informations documentées peuvent être issues de l’analyse des risques et d’opportunités, des exigences ou des besoins de clients ou d’autres parties intéressées.

Plus que la forme, le fond détermine le besoin : la recherche de l’efficacité.
Avant de créer un document, une procédure, un manuel, il convient avant de démarrer de se poser les questions suivantes :

  • Pourquoi faire ?
  • Pour qui ?

Si la seule réponse est pour répondre aux exigences de l’auditeur, alors nous vous recommandons de revoir votre position (parole d’auditeur).

Ces informations documentées doivent être maîtrisées. Ainsi pour les documents créés ou modifiées, il convient comme par le passé de les identifier, de mettre à disposition des informations à jour de les revoir régulièrement voir article 7.5.2 Création et mise à jour des informations documentées.

Les conditions de conservation de ces informations doivent être maîtrisées, protégées contre « des altérations, …) les durées de conservation doivent être définies (voir article 7.5.3)

Les informations sur le fonctionnement des processus :

L’article 4.4 Système de management de la qualité et ses processus et plus particulièrement l’exigence 4.4.2 apporte des exigences complémentaires :

«  L’organisme doit, autant que nécessaire:
a) tenir à jour les informations documentées nécessaires au fonctionnement de ses processus;
b) conserver les informations documentées pour avoir l’assurance que les processus sont mis en oeuvre comme prévu ».

le pilotage du système et des processus :

Parmi ces informations documentées nous retrouvons toutes celles qui vont permettre de piloter le système de management, les processus et les ressources correspondantes :

  • Les objectifs qualité et la planification des actions pour les atteindre (article 6.2)
  • les informations documentées appropriées démontrant l’adéquation des ressources pour la surveillance et la mesure (article 7.5.1),
  • Les preuves des compétences (article 7.2 compétences)
  • Les informations documentées sont également utiles pour ce qui concerne les activités opérationnelles :

Elles doivent être suffisantes (article 8.1 Planification et maîtrise opérationnelle) pour :

  • Avoir l’assurance que les processus de planification et de maîtrise opérationnelle ont été réalisées comme prévues
  • Démontrer la conformité des produits et services aux exigences applicables.

La revue des exigences relatives aux produits et services

En matière de revue des exigences relatives aux produits et services :  (article 8.2.3), des informations documentées doivent, le cas échéant, être conservées sur les résultats de la revue d’une part, sur toute nouvelle exigence relative aux produits et services.

Les modifications des exigences relatives aux produits et services :

Les modifications des exigences relatives aux produits et services :
Les informations documentées sur les modifications des exigences relatives aux produits et services doivent être amendées et les personnes concernées informées. (article 8.2.4).

la conception et le développement :

Pour ce qui concerne la conception et le développement, peu de changements par rapport à la version 2008. La maîtrise de ces activités nécessite de conserver des informations documentées sur :

  • Les éléments d’entrées (article 8.3.2)
  • Les éléments de sortie (article 8.3.4)
  • Les modifications, les résultats des revues, l’autorisation des modifications, les actions entreprises pour prévenir les impacts négatifs (article 8.3.6)

la maitrise des prestataires externes :

Les prestataires externes doivent bien évidement être maîtrisées. Il convient donc de conserver des preuves de cette maitrise ainsi que des évaluations correspondantes (article 8.4).

La production et la prestation

En matière de production et de prestation, l’organisme doit maitriser sa production et ses prestation.

A ce titre, « les conditions de maîtrise doivent comprendre le cas échéant la disponibilité des informations relatives aux caractéristiques des produits et des services devant être fournis ou des activités devant être réalisées ainsi que les résultats à obtenir » (article 8.5.1) . Il s’agit ici des éventuelles procédures, instructions, modes opératoires ou autres supports utiles permettant de maitriser les phases de réalisation.

Cette maitrise nécessite de disposer également d’informations documentées en matière :

  • D’identification et de traçabilité (article 8.5.2)
  • De problèmes rencontrés pour les produits ou services dont le client est propriétaire (Article 8.5.3)
  • De résultats des revues des modifications, la ou les personnes autorisant les modifications et toutes les actions nécessaires issues de la revue.
  • De libération des produits et services et notamment les preuves de la conformité aux critères d’acceptation ainsi que la traçabilité jusqu’à la (aux) personne(s) ayant autorisé la libération (article 8.6)
  • Les non conformités (description, actions menées, dérogations obtenues, autorité ayant décidé des actions correspondantes (article 8.7.2)

Les surveillances, mesures, analyses et améliorations

Pour ce qui concerne les surveillances, mesures, analyses et améliorations, des informations doivent être conservées notamment :

  • Les résultats correspondants (article 9.1)
  • Les preuves de réalisation des programmes et des résultats d’audits (article 9.2)
  • Les éléments de sorties de la revue de direction (article 9.3.3)
  • Les preuves de traitement des non conformités, des actions conduites, les résultats des actions correctives (article 10.2.2).

En conclusion,

En 1987, la formalisation écrite de méthodes de travail apparaissait comme un élément prépondérant de la norme ISO 9001 dans un contexte où le besoin de structurer une organisation par de l’écrit était nécessaire.

En 2015, l’ISO 9001 a su évolué au regard du contexte, des enjeux d’un monde toujours plus complexe, plus mouvant où les changements sont plus fréquents, plus rapides, où l’entreprise doit être de plus en plus agile, tout en étant rigoureuse.

A ce titre, elle doit :
disposer de processus évolutifs. Elle doit être consciente de l’incertitude qui l’entoure et à ce titre être en capacité d’assurer une maitrise raisonnable des risques correspondants.

La documentation n’est plus une fin en soi mais un moyen qu’il convient d’adapter au regard des risques et des opportunités identifiés. Plus que des procédures ou méthodes préétablies et figées, l’entreprise doit être en mesure de planifier ses processus et ses méthodes au regard des analyses de risques et opportunités de leur actualisation.

Toutefois l’agilité ne doit pas remettre en cause la rigueur (à ne pas confondre avec la rigidité). Les décisions sont prises sur des faits et les faits s’appuient sur des preuves de réalisation d’activités de maîtrise, de contrôle, de modification, d’améliorations qu’il convient de conserver en vue de pouvoir dialoguer, décider, agir ou améliorer.